
Les habitants de la ville suédoise de Kiruna, située à 145 kilomètres au nord du cercle polaire arctique, doivent composer avec la plus grande mine de fer du monde.
Le minerai de fer extrait au rythme quotidien de 75 000 tonnes est transporté par trains entiers jusqu’au port norvégien de Narvik principalement, dont les eaux du Ofotfjord, ouvert sur la mer de Norvège, sont toujours libres de glace, mais aussi, secondairement, en direction du port suédois de Luleå au bord de la mer Baltique à 304 km par le rail de Kiruna.
La construction de la ligne ferroviaire Kiruna – Narvik, d’une longueur de 169 km, a été achevée au mois de novembre 1902. Cette ligne comprend une section de 127 km en territoire suédois électrifiée en 1915 et une section de 42 km en territoire norvégien électrifiée en 1923.
De la gare de Kiruna (altitude 506 m) à Riksgränsen (altitude 523 m), dernière gare avant la frontière norvégienne, la ligne de chemin de fer traverse une contrée vallonnée où son point le plus bas se trouve à 375 m d’altitude sur le tronçon sinueux longeant les rives sud du lac Torneträsk.
Côté Norvège, la ligne construite à flanc de montagne descend de manière continue jusqu’au port de Narvik (altitude 6 m). Elle offre aux voyageurs, sur la plus grande partie de son itinéraire, un panorama exceptionnel par beau temps sur le fjord Rombaken. La déclivité moyenne est de 21 ‰ et la déclivité maximale atteint 25 ‰.
La ligne à voie unique Kiruna – Narvik, équipée de nombreuses voies d’évitement de plus de 750 m de long permettant une fluidité optimale du trafic ferroviaire, est parcourue 7j/7 par quatorze trains de minerai de fer, parmi lesquels douze sont opérés par deux filiales de la compagnie minière LKAB et deux par la société Kaunis Iron, dont les convois de cette dernière partent de Pitkäjärvi. Chaque train aux couleurs de LKAB est composé de deux puissantes locomotives électriques monocabines Iore fabriquées à Kassel en Allemagne par la société ADtranz rachetée par Bombardier en 2001 et de 68 wagons-trémies. Pour ce qui est de la société Kaunis Iron, chaque train comprend 18 paires de wagons à déchargement ultrarapide tractées par deux voire trois locomotives TRAXX F140 AC2 Re 482 Bombardier. A Narvik, chaque société dispose de son propre terminal d’expédition du minerai de fer aux quatre coins du monde.










La ligne ferroviaire Kiruna – Narvik voient également circuler d’autres trains de fret, dont l’un d’entre eux achemine des conteneurs et des remorques routières d’Oslo, la capitale de la Norvège, à Narvik et vice versa, via les voies ferrées suédoises, ainsi que trois trains de voyageurs quotidiens dans chaque sens, dont un train de nuit Stockholm – Narvik. Il existe également une circulation saisonnière à vocation touristique baptisée Arctic Train entre Narvik et Abisko assurée par une rame automotrice triple caisse BM 69 issue d’une série construite par le Norvégion Strømmen et le Suédois ASEA.






Les 120 ans de l’achèvement de la construction de la ligne ferroviaire Kiruna – Narvik ont été fêtés du jeudi 30 juin au dimanche 3 juillet 2022. A cette occasion, deux trains chargés de minerai de fer ont été tractées aux premières heures du dimanche 3 juillet par des locomotives historiques, le premier, composé de 14 wagons-trémies et de deux wagons de couplage, par la locomotive à vapeur n° 976 de type 0-10-0 construite en 1909 par le Suédois NOHAB et le second, composé de 52 wagons-trémies, par une locomotive électrique Dm3 du constructeur suédois ASEA de type 1’D+D+D1′ année 1970 numérotée 1246-1247-1248 et baptisée « Oskar » retirée du service régulier en 2013. Un train restaurant spécial tiré par la locomotive électrique historique Da du constructeur suédois ASEA année 1955 numérotée 888, a circulé durant les quatre jours de festivités entre Kiruna et la gare d’Abisko Östra. Les trois locomotives historiques, dont il vient d’être fait mention, sont préservées et entretenues en état de marche par le Musée suédois du chemin de fer de Gävle.








Pour revenir à Kiruna, la ville est en train d’organiser son déménagement. Elle est en effet menacée par l’affaissement du sol provoqué par l’exploitation de la mine de fer dont le filon s’enfonce en diagonale à 2 kilomètres sous la ville.
Afin de poursuivre les opérations minières, il est impératif de déplacer les personnes dont les habitations sont exposées aux effondrements.
Le projet consiste donc à déménager le quartier le plus proche de la mine à 3 kilomètres vers l’est, d’ici 2035. Ce sont 8 000 personnes à reloger. L’opération, financée en totalité par la compagnie minière LKAB, est unique et monumentale : plutôt que d’être démontés et remontés, certains bâtiments historiques et patrimoniaux doivent être délicatement détachés de leurs fondations puis placés sur des convois qui les acheminent par la route, comme s’il s’agissait de véhicules mal garés. Les autres immeubles sont démolis et remplacés par un parc pour ne pas laisser un quartier fantôme dans le rétroviseur (source : le blog « Demain la ville »).
La gare historique de Kiruna figure parmi les immeubles démolis jusqu’à présent. Mise en service au début du XXe siècle à proximité du centre-ville, elle a cessé toute activité le samedi 31 août 2013, jour où la nouvelle gare a été ouverte. Le nouveau bâtiment a été construit à 2 km au nord de l’ancien qui a totalement disparu du paysage en 2017 tout comme l’ensemble des quais et voies ferrées le jouxtant.


Les deux photos suivantes ont été prises à Narvik (Norvège), le jeudi 10 août 1989.


Info : Thierry Leleu et Edouard Paris