Une unité multiple composée de deux locomotives électriques monocabines Iore ADtranz/Bombardier aux couleurs de la compagnie minière LKAB, n° 124 en tête, tractant des wagons-trémies chargés de minerai de fer et circulant en direction de Narvik (Norvège), est photographiée au moment de son passage en gare de Vassijaure, le mardi 11 juillet 2023. C’est à proximité de cette gare suédoise qu’un premier déraillement a eu lieu le dimanche 17 décembre 2023 et qu’un second déraillement est survenu le samedi 24 février 2024, quatre jours après la remise en service de la ligne ferroviaire Kiruna – Narvik. Copyright : Thierry Leleu

La ligne ferroviaire transfrontalière Kiruna (Suède) – Narvik (Norvège), d’une longueur de 169 km, a été achevée au mois de novembre 1902. Cette ligne comprend une section de 127 km en territoire suédois électrifiée en 1915 et une section de 42 km en territoire norvégien électrifiée en 1923.

Cette ligne a été construite dans le but d’acheminer les ¾ du minerai de fer extrait des mines les plus importantes du monde situées à Kiruna et ses alentours, jusqu’au port de Narvik qui a la particularité de n’être jamais pris dans les glaces en hiver contrairement au port de la ville suédoise de Luleå ouvert sur la mer Baltique à 304 km par le rail de Kiruna.

La ligne à voie unique Kiruna – Narvik, équipée de nombreuses voies d’évitement de plus de 750 m de long permettant une fluidité optimale du trafic ferroviaire, est parcourue 7j/7 par quatorze trains de minerai de fer, dont douze sont opérés par deux filiales de la compagnie minière LKAB appartenant en totalité à l’Etat suédois et deux par la société Kaunis Iron, dont les convois de cette dernière partent de Pitkäjärvi. Chaque train aux couleurs de LKAB est composé de deux puissantes locomotives électriques monocabines Iore fabriquées à Kassel en Allemagne par la société ADtranz rachetée par Bombardier en 2001 et de 68 wagons-trémies pouvant transporter jusqu’à 100 tonnes de minerai de fer chacun. Pour ce qui est de la société Kaunis Iron, chaque train comprend 18 paires de wagons à déchargement ultrarapide tractées par deux voire trois locomotives bicabines TRAXX F140 AC2 Re 482 Bombardier, pouvant acheminer 2 900 tonnes de concentré de minerai de fer. A Narvik, chaque société dispose de son propre terminal d’expédition du minerai de fer aux quatre coins du monde. Deux à trois trains de fret Oslo – Narvik, un train de nuit Stockholm – Narvik, un train de voyageur Kiruna – Narvik, un train de voyageurs Luleå – Narvik et un train touristique saisonnier Narvik – Bjørnfjell complètent le trafic quotidien de la ligne dans chaque sens.

Photos prises sur la section suédoise de la ligne ferroviaire du minerai de fer Kiruna – Narvik, les mardi 11, jeudi 13 et lundi 17 juillet 2023. Copyright : Thierry Leleu

Photos prises en gare de Narvik (Norvège) et ses abords, le samedi 15 juillet 2023. Copyright : Thierry Leleu

Les circulations ferroviaires ont été brutalement interrompues à la suite du déraillement d’un train de la compagnie LKAB transportant du minerai de fer à destination du terminal portuaire de Narvik survenu le dimanche 17 décembre 2023 à proximité de Vassijaure en Suède, dont la gare se trouve à huit kilomètres de la frontière avec la Norvège. Des rails, des aiguillages et 25 000 traverses ont dû être remplacés sur une portion de ligne de 15 km de long entre Tornehamn et Vassijaure. Le trafic ferroviaire a pu reprendre le mardi 20 février 2024.

Le samedi 24 février 2024 au soir, un nouveau déraillement est survenu entre la frontière norvégienne et la gare de Vassijaure, impliquant un train de la compagnie LKAB revenant à vide du terminal portuaire de Narvik et circulant en direction de Kiruna. Aux dernières nouvelles, la remise en service de la ligne du minerai de fer est annoncée pour le jeudi 7 mars 2024 à 16h.

Selon la compagnie minière LKAB, un seul jour de fermeture de la ligne lui fait perdre 8,8 M€. Plus de trois millions de tonnes de minerai de fer seraient actuellement stockés sur les sites de Kiruna et Svappavaara et pas moins de 500 trains seraient nécessaires pour acheminer cette énorme quantité de minerai de fer jusqu’à Narvik.

A la suite du second déraillement, la police suédoise a décidé de mener des enquêtes approfondies sur les causes de chaque déraillement et n’exclut pas la piste du sabotage.

Simple coïncidence, les deux déraillements successifs sont survenus alors que la Suède est sur le point de rejoindre l’OTAN (Organisation du Traité de l’Atlantique Nord).

Non seulement la fermeture de la ligne ferroviaire du minerai de fer pénalise financièrement l’Etat Suédois, mais encore l’activité du port de Narvik en Norvège, un pays membre de l’OTAN, est fortement impactée. De plus, une réduction de l’approvisionnement en minerai de fer des aciéries de la plupart des pays européens, dont une majorité est membre de l’OTAN, pourrait déboucher sur une hausse du prix de la tonne d’acier dont le cours joue aux montagnes russes ces derniers mois.

Toujours est-il que le site indépendant jvgfoto qui donnait toutes les circulations ferroviaires fret et voyageurs de Suède en temps réel ligne par ligne, n’affiche plus que les circulations ferroviaires voyageurs depuis le mois de janvier 2024. Un message précise : « L’administration suédoise des transports a désactivé les données sur les trains de marchandises dans l’API ouverte, qui est utilisée comme source de données pour les services, de sorte que seules les données sur les trains de voyageurs peuvent désormais être recherchées et affichées ici. »

Info : Thierry Leleu et Edouard Paris